Les Élatérides tout comme les buprestes, sont une grande famille très homogène, qui comprend 7000 espèces mondiales, dont 300 espèces vivent en Europe occidentale et environ 170 en France. Le corps de l’adulte a une allure compacte caractéristique (Fig.1)
Il est ovale, aplati et sans étranglements latéraux entre tête, thorax et abdomen; ventralement, les sternites thoraciques empiètent largement sur l’abdomen. le prosternum est articulé de façon souple par rapport au mésosternum et forme une pointe qui s’insère dans une fossette de ce dernier. Ces deux parties sont reliées entre elles par des muscles très puissants. A l’arrière du mésosternum, le métasternum forme deux grandes plaques qui portent les pattes postérieures, lesquelles semblent ainsi sortir du milieu de l’abdomen. Les pattes du taupin sont courtes et ne lui permettent pas de se remettre à l’endroit quand il est sur le dos: aussi, il s’en sort autrement: Il s’arqueboute sur lui-même en se cambrant fortement en arrière, puis se cambre subitement dans l’autre sens (fig. 4) ; c’est l’impact de son apophyse prosternale, frappant la cavité mésosternale à la manière d’un percuteur, qui produit un bruit sec et projette par contrecoup l’animal en l’air, lui permettant de revenir sur ses pieds. Cette détente procure une sensation curieuse quand on presse un taupin entre le pouce et l’index. Ce claquement sec que les Elatérides émettent en se détendant a été comparé au bruit des mineurs, nommés « taupins », qui sapaient les remparts des villes assiégées. Pour cette raison, on leur a donné ce nom, ainsi que ceux de « forgerons », « maréchaux », « sauterillots », « toques-maillot » ou « tape-tape »… Rien à voir avec les taupins des grandes écoles, qui se détendent tout autrement !
Les adultes sont phytophages et vivent sur les arbres, les fleurs, les plantes herbacées et aussi sous les pierres. Les larves sont allongées, avec une peau cornée brillante jaunâtre trés chitinisée. En raison de leur aspect caractéristique, elles ont été nommées « vers fil de fer » (Fig.2). La plupart sont cylindriques; certaines toutefois, comme celles des Lacon ou des Corymbites sont aplaties. Celles des Cardiophorus sont trés allongées et restent molles. Les larves de taupins sont surtout phytophages.
En général, elles peuvent vivre en litière, dans des bois pourris ou des trous d’arbre, où elles consomment des matières végétales plus ou moins décomposées; mais cela ne leur suffit pas, et elles deviennent alors carnassières (comme d’ailleurs certains adultes) et s’attaquent par exemple à des larves vivantes d’insectes xylophages. Certaines sont même strictement carnivores comme celles de Selatosomus bipustulatus L. qui vit dans des lichens. D’autres larves de taupins vivent en terre et attaquent les parties souterraines des plantes ; ce sont celles-là qui peuvent être nuisibles à l’agriculture. En période de sécheresse, ces larves affamées et assoifées attaquent en nombre les racines et le collet des plantes. Les Agriotes, (Fig.1) représentés en France par une dizaine d’espèces dont quatre sont particulièrement nuisibles. Chez ce genre, les adultes, après un hivernage dans le sol, sortent subitement en surface, mais s’enterrent à nouveau ou s’abritent à l’ombre en période de canicule. Les femelles fécondées s’enterrent aussi superficiellement pour pondre. La larve, d’abord détriticole, s’attaque ensuite à des tubercules de pomme de terre ou des racines ; l’organe enterré est miné de part en part par des galeries droites qui s’ouvrent à l’extérieur par un large orifice. Le développement larvaire dure quatre ans; la métamorphose se fait alors, mais l’adulte ne sort de sa loge qu’au printemps de la cinquième année (Fig. 3).
Pendant toute la vie larvaire, les dégâts sont considérables dans les champs de carottes, de betteraves ou de pommes de terre, et dans les plantations de céréales. Les larves de taupins prolifèrent souvent de façon spectaculaire : Aux États-Unis, on a pu en dénombrer jusqu’à 2 000 par mètre carré !
Les adultes de certains taupins hivernent sous les écorces d’arbre. Nous avons ainsi récolté Cardiophorus rufipes sur les platanes de l’Hérault. Les nuits d’été ils sont souvent attirés par les lumières (comme Melanotus rufipes), et il y en a même dans les régions tropicales, qui sont eux-même lumineux, à des fins d’attraction sexuelle ! Les « Cucujos » ou « Coyouyous » d’Amérique tropicale (Pyrophorus noctilucus) (Fig. 4) se comportent à cet effet comme de véritables vers luisants et peuvent servir de lanterne ou de parure (cf. Des taupins lumineux) ! C’est sur cette note « lumineuse » que nous quitterons le monde sautillant des taupins.
Bibliographie citée :
AGUILAR J.d’, 1956 – Insectes lumineux, Naturalia, juin : 8-13.
BALACHOWSKI A.,MESNIL L.,1935 – Les insectes nuisibles aux plantes
cultivées. Paris
BLANCHARD E.,1877 – Métamorphoses, mœurs et instincts des insectes.
DUBOIS R.,1886 – Contribution à l’étude de la production de la lumière par les
êtres vivants. Les Élatérides lumineux. Bull. Soc. zool. Fr.,11 :1-275.
GAETAN DU CHATENET,2000 – (op.cit.)
GIRARD M.,1766 – Mem.Acad.roy.Sci. (cf. J. D’Aguilar)
MOUFET,1634 – Insectarum sive minorum animalium theatrum (cf. J. D’Aguilar)
X.- Insectes d’Europe. in: Encyclopédie Horvath, S.F.L., Paris
WIGGLESWORTH V.B., 1970 – La vie des insectes, in La Grande Encyclopédie de
la Nature, Rencontre ed., Lausanne.
Michel Emerit