Au cours de quatre courtes chroniques, nous évoquerons les chênes familiers des paysages méditerranéens. En tant que lexicographe et ethnobotaniste en domaine occitan, c’est très peu en termes de botanique que nous aborderons le sujet, mais avant tout sous son aspect culturel et lexical : quels usages avaient-ils dans nos régions, comment étaient-ils perçus et nommés, quels toponymes (noms de lieux) et anthroponymes (noms de personnes) ont-ils donné, quels sont les noms français empruntés à l’occitan pour décrire les paysages, tous problèmes qui relèvent de l’ethnobotanique, c’est-à-dire des rapports étroits que l’homme entretient avec son environnement végétal.
De fait, à cause de la coupure avec la nature, des pans entiers de savoirs populaires disparaissent ou ont disparu définitivement. Ils étaient pourtant le signe d’un rapport très privilégié avec la nature méditerranéenne. Ainsi pour le sujet qui nous préoccupe, peu de gens savent encore distinguer et nommer les chênes (hormis les passionnés de botanique bien sûr), savoir pourtant spontané chez tous les paysans et vignerons : nous ne croyons donc pas inutile de tracer rapidement le « portrait culturel » de ces arbres autrefois familiers de tous, mais devenus étrangers à beaucoup d’habitants de la région. La lecture des cartes géographiques prend ainsi un tout autre sens lorsque l’on sait décrypter les noms de plantes qui ont servi à former les innombrables noms de lieux.
L’évocation de quelques notions élémentaires d’écologie ou de floristique sera avant tout un prétexte à introduire un vocabulaire qui transparait dans les noms de lieux, ou à évoquer le regard occitan sur l’environnement, notamment à travers des citations d’auteurs.
En ce qui concerne les noms occitans (toujours écrits en caractères gras), nous donnerons les noms languedociens, suivis des noms provençaux dans le cas où ils sont différents. Il n’est bien sûr pas question de rentrer ici dans les moindres détails des appellations, et de faire de la dialectologie : nous restituerons ces renseignements plus complets dans un dictionnaire d’ethnobotanique en cours de rédaction. Afin d’aider les lecteurs peu au fait de la langue d’oc, nous donnerons ici ou là une prononciation phonétique approximative (la syllabe soulignée représentant l’emplacement de l’accent tonique).
A tout seigneur tout honneur, tout d’abord l’arbre-roi des collines du Midi : le chêne vert
Josiane Ubaud
Les quatre articles suivants sont : 1 – Le chêne vert. 2 – Le chêne blanc. 3 – Le chêne-Kermès. 4 – Le chêne-liège.